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DEVELOPPEMENT DURABLE







 La seconde guerre mondiale a marqué un tournant décisif dans l’histoire de la pensée du développement dont les fondements se situent au 4e point du discours sur l’état d’union d’Harry TRUMAN en 1949 dans lequel, il institue comme mot d’ordre «it must be a worldwide effort for the achievement of peace, plenty and freedom [1]». La vague des indépendances des années 1960 en Afrique va favoriser quant à elle l’émergence de nombreuses politiques de développement s’inspirant des travaux d’un certain nombre d’économistes et sociologues dont les paradigmes ont dominé le 19e et le 20e siècle et qui sont à juste titre qualifiés de pionniers du développement[2]. Il s’agit ainsi de la THEORIE DE LA MODERNISATION prônant le libre-échange, la THEORIE DE LA DEPENDANCE et l’INSTITUTIONNALISME. L’incapacité de ces théories à sortir le Tiers Monde dans la misère donne d’autre part lieu aux stratégies de développement dont la toute première est UJAMA’A développée par Julius Nyerere dès 1967. Puis celle de la SATISFACTION DES BESOINS FONDAMENTAUX de McNamara en 1973. En 1980, toute la communauté internationale semble s’accordée que Le trickle-down effect escompté et le rattrapage visé ne sont pas atteints[3]. Les deux dernières décennies n’auront donc été que des décennies perdues. LE CONSENSUS DE WASHINGTON et L’EMERGENCE DES ONG constituent donc une réponse palliative à la mort de l’Etat. La redéfinition de la géopolitique mondiale en 1989 avec la chute du mur de Berlin donne naissance aux idées nouvelles qui font croire que DEMOCRATIE ET DROITS DE L’HOMME riment avec développement. Cependant, tandis que le consensus a été jusque-là fondé sur la réalisation de l’homme entant qu’objet et/ou sujet du développement, son espace vital est resté au second plan. Repenser le développement en termes de DEVELOPPEMENT DURABLE devenait dès lors une nécessité.
Le sommet de la Terre à Rio a consacré l’année 92 comme celle de l’avènement d’un nouveau paradigme dans le vocabulaire du développement dit « développement durable » ou «développement soutenable». Si « toute la communauté internationale est alors unanime sur le fait que le développement par la productivité et la croissance économique est à l’origine d’une détérioration inquiétante de l’environnement[4]», et qu’il faille le repenser, la définition du concept de développement durable reste cependant problématique certainement du fait de toute la difficulté qu’il y a à définir le développement lui-même[5] et peut être aussi de la relativité du mot durable. Pour Richard Norgaard, “it is impossible to define sustainable development in an operational manner in the detail and with the level of control presumed in the logic of modernity[6].”
Cependant, le rapport de la commission Brundtland intitulé Our common future émis 5 ans plutôt définit clairement les objectifs du développement durable comme «the ability to make development sustainable to ensure that it meets the needs of the present without compromising the ability of future generations to meet their own needs[7]….. a process in which the exploitation of resources, the direction of investments, the orientation of technological development and institutional change are all in harmony, and enhance both current and future potential to meet human needs and aspiration[8]». Au sommet de Johannesburg sur le développement durable en 2002, l’ONU consacre l’approche définitionnelle de Brundtland et perçoit le développement durable comme étant «un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre les possibilités pour les générations à venir de satisfaire les leurs». Il s’agit dès lors d’un développement inter et intra générationnel très souvent identifié par le triptyque «People - Planet – Profit».
A la différence des stratégies jusqu’ici étudiées, le développement durable ne vise plus seulement à sortir le Tiers-Monde de sa léthargie socioéconomique, mais plutôt cherche des solutions globales pour l’humanité entière. L’Afrique devient dès lors un acteur incontournable et incontesté du processus. A l’heure où se prépare Rio + 20,  nous ne pouvons-nous empêcher de nous demander si le chemin parcouru a été conforme aux engagements pris. Par ailleurs en quoi consiste véritablement le développement durable? D’où tire-t-il ses origines? Et quels en sont les impacts?
Fournir des éléments de réponse à ces questions est la préoccupation majeure de ce travail qui essaye de découper les 20 années du développement durable caractérisées par de multiples sommets et conférences. Au-delà de l’émergence du concept (I), nous nous intéresserons dans cet exposé au contenu du développement durable (II), à son analyse critique (III).

C’est dans la 2e moitié du 20e siècle que nait formellement le débat sur le développement soutenable sans que le terme « développement durable » y soit explicitement employé. Il est cependant important de noter que bien avant cette date, de nombreuses sociétés se préoccupaient déjà des questions environnementales telles que l’exprime ici Roa Pako: « Sustainable development has for hundreds of several years, been an area of concern for different sections of society. Usually, these concerns have been confined to specific components of the ecosystem. Some were built into the traditions of some civilizations, and into faiths and religions of a few others. One of this has been the worship of nature. Some religions advocated unity and harmony of nature in relation to human activities[9] ».  Ces idées environnementalistes sont perceptibles dans les travaux de Malthus où il met en relief l’antagonisme entre ressources et population, mais bien plus encore, dès le début du développement de l’industrialisation européenne, les économistes comme Karl Marx, Stuart Mill et Alfred Marshall mettent en garde contre une économie qui ne tiendrait pas compte de la limitation des ressources. Il faut cependant attendre les années 1850 pour que le parlement britannique vote les premières lois sur la pollution et la protection des animaux et le tout premier traité international sur la non pollution des eaux sera quant à lui signé en 1909 entre l’Angleterre et les Etats unis.

A.   ROLE PRECURSEUR DES SOCIETES CIVILES


Le 2 juin 1923, le professeur louis Mangin évoquait à l’issue du premier congrès international pour la protection de la nature à paris, la nécessité de protéger la nature. Selon lui, la détérioration de celle-ci se fait par une destruction désastreuse de notre environnement et affirmait alors qu’une exploitation prudente assurerait sa perpétuité.  Vingt-cinq ans plus tard, l’Union Internationale pour la Protection de la Nature (UIPN) voyait le jour en se focalisant sur les trois piliers du développement durable. Car il était temps de convaincre l’homme sur la nécessité de protéger et même de régénérer ses ressources et de ne consommer qu’avec ménagement, de manière à garantir la prospérité du monde et sa sécurité future. En 1968, l’UNESCO  notamment avec la collaboration de l’UIPN, devenue l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature) organisait  à paris une conférence dite « conférence de la biosphère ».
Ce fut le premier forum intergouvernemental discutant et promouvant l’idée de « développement durable », sans que l’expression y soit explicitement établie. L’UICN se donne alors pour mission d’influer sur les sociétés du monde entier, de les encourager, de les aider à conserver l'intégrité et la diversité de la nature, et de veiller à ce que toute utilisation des ressources naturelles soit équitable et écologiquement durable. Son objectif de protection de la nature passe notamment par la sauvegarde des espèces animales et végétales menacées, ainsi que par la mise en place d’actions visant à promouvoir l’utilisation rationnelle des ressources naturelles. La mise en œuvre de cette stratégie fait l’objet d’un suivi par l’intermédiaire de conférences internationales.

B.   LE ROLE DES NATIONS UNIES : DE PEARSON A BRUNDTLAND


Depuis 1967, trois Commissions de haut niveau ont été convoquées par la Banque mondiale à intervalle de dix ans avec pour objectif de rassembler un groupe de personnalités d'expérience qui  étudieraient en commun les effets de longues années d'aide pour le développement, en évalueraient les résultats, décèleraient les erreurs et proposeraient les politiques qui pourraient mener à des progrès plus rapides à l'avenir.
La première commission a été dirigée en 1968 par Lester Pearson, ancien Premier ministre du Canada. Elle fait remarquer que la  pollution environnementale causée par les habitudes de vie malsaines d'un pays peut avoir des incidences négatives sur la santé et sur l'intégrité écologique d'autres pays et que les épidémies ne s'arrêtent pas aux frontières nationales. Le rapport Pearson souligne à cet égard que la mise en place d'un développement soutenable et stable exige une répartition équitable de la prospérité et de l'accès aux ressources essentielles. Il propose ainsi une longue liste de recommandations à suivre parmi lesquelles l'amélioration de la planification systématique et des critères d'évaluation des projets et programmes de développement.
Suite aux diverses plaidoiries qui se font de part et d’autre, une prise de conscience se fait remarquer notamment avec la création du club de Rome qui est un organisme de réflexion prospective, crée en 1968 par les grands patrons européens, principalement italiens. Ce club publie en 1972 un rapport intitulé « halte à la croissance ». Dans leur projection, les variables « population » et « industrialisation » sont les principales causes de l’épuisement des ressources et de la détérioration de l’environnement. Ce débat sur l’environnement est donc au centre des préoccupations de la première conférence des nations unies de Stockholm (1972).
La conférence de Stockholm tenue en juin 1972 marque un tournant dans l'émergence de la conscience environnementale planétaire. Moment de rencontre, de confrontation et d'échange, elle en a été un catalyseur dans la mesure où elle donne naissance aux principes de base du développement durable: c’est à l’homme qu’incombe la responsabilité de la protection et de l’amélioration de l’environnement pour les générations présentes et futures ; la sauvegarde des ressources naturelles de la Terre doit faire l’objet d’une programmation et d’une gestion appropriées et vigilantes, tandis que la capacité de la Terre à produire des ressources vitales renouvelables doit être conservée et améliorée.
Dans la Déclaration finale, les pays participants établissent que: "L'homme est à la fois créature et créateur de son environnement, qui assure sa subsistance physique et lui offre la possibilité d'un développement intellectuel, moral, social et spirituel[10]." Pour mettre en œuvre ces engagements, les pays présents décident de créer une organisation nouvelle appelée Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) ayant son siège à Nairobi.  Au sortir de Stockholm ; les dirigeants des pays entreprirent de se réunir chaque dix ans pour débattre des problèmes environnementaux.
En 1977, Brandt[11] reprend à son compte la mise en garde de Pearson: « Les solutions rapides aux problèmes de développement sont illusoires. » Il souligne en outre la nécessité de « réduire la courbe ascendante des armements compliqués et onéreux». Pour Brandt, les politiciens et les fonctionnaires qui définissent les politiques de développement des donateurs sont « trop loin de l'expérience de l'homme moyen ». La pollution, atmosphérique et autre, ainsi que la surexploitation des ressources terrestres et aquatiques s'accentuent sur toute la planète. La surpêche, la déforestation sauvage, l'érosion des sols et l'avancée des déserts menacent la qualité de vie de nombreuses collectivités, et leur survie même. Les pays prospères ne se rendent pas à l’évidence que nous vivons dans un monde d'interdépendance. Il insiste aussi sur le fait que celui-ci doit s'intéresser avant tout au bien-être des gens, pas seulement aux technologies.
Suite à l’échec du sommet de la terre de 1982 à Nairobi à cause du boycott américain, l’assemblée générale des nations unies décide en 1983 de constituer une commission mondiale sur l’environnement et le développement appelée commission Brundtland[12]  qui, à la différence des commissions Pearson et Brandt se voir confier spécifiquement le mandat d'analyser les interactions entre l'environnement et le développement. Son rapport final fait état d’une longue liste des dommages et désastres environnementaux parmi lesquels : Chaque année, six millions d'hectares de terres sèches productives se transforment en déserts stériles, Les précipitations acides (générées par les émissions des industries et des véhicules) tuent des forêts et des lacs et endommagent d'importantes superficies de terre au-delà du seuil de réversibilité, La combustion de carburants fossiles produit des dégagements de CO2 dans l'atmosphère qui accentuent le réchauffement planétaire, La déforestation pratiquée par les agriculteurs des terres hautes produit des inondations dans les fermes des terres basses.
Brundtland propose ainsi des mesures susceptibles de freiner l'explosion démographique dans les pays pauvres. Le rapport Brundtland fait également la recommandation suivante: « Les gouvernements et les institutions internationales devraient procéder à un bilan « coût-efficacité » en tenant compte de ce qu'il en coûterait, pour parvenir à la sécurité, soit que l'on dépense l'argent en armements, soit qu'on le dépense à réduire la pauvreté ou à restaurer un environnement ravagé. » Le croisement des problématiques économiques et environnementales par la commission mondiale de l’environnement et du développement porte ses fruits en 1992 au Sommet de Rio de Janeiro.


A partir des années 90, le développement durable prend une connotation mondiale et s’entoure d’un certain nombre de principes qui vont meubler le contenu de la quasi-totalité des sommets et conférences internationales après Rio.

A.   RIO 1992: ENJEUX ET RESOLUTIONS


Le 1er sommet de la terre de 92 a été considéré comme la plus grande conférence jamais tenue[13] à l’époque du fait qu’elle  fut la 1ere à réunir autant de représentants étatiques, des représentants des Nations Unis, des Organisations et associations internationales,  des scientifiques, des journalistes soit près de 30.000 personnes. Toutefois, pour mieux l’appréhender, il serait nécessaire de  connaitre quels ont été ses enjeux et les différentes résolutions qui y ont été prises.

1.      ENJEUX


Ce sommet est la résultante d’un constat fait il y a de cela plus d’une cinquantaine d’années et la succession de divers autres sommets, conférences traités ou conventions  qui virent le jour dès 1946. A cette date, toute la communauté internationale semble d’accord sur le fait que tout développement qui se veut passer par une productivité et la croissance économique n’aura que des conséquences néfastes, désastreuses sur l’environnement en même temps que sur les hommes.
L’objectif de ce sommet est de réfléchir sur l’amélioration de l’équilibre de la planète dans les 10 ans qui viennent, pour que le 21e siècle soit le siècle du développement soutenable. L’ensemble des textes adoptés à l’issue de Rio témoigne de l’importance dudit sommet que Rao Pako juge en ces termes : « this was a clear sign of times : societies all over the planet perceived significant changes and problems in resources and environment, and pragmatic solutions … were a great demand[14]. » Ces textes sont cependant la résultante d’un compromis entre les pays industrialisés et les pays en développement. Tandis que les premiers voulaient une brève charte soulignant la protection de la planète, les seconds souhaitaient qu’il y soit stipulé de manière détaillée: leur droit souverain au développement, que les pays industrialisés sont les principaux responsables de la situation écologique actuelle et qu’il soit établit que de nouvelles ressources et techniques sont nécessaires pour permettre aux PVD de ne pas appliquer des modes de développement aussi polluants que ceux des pays développés. Il a cependant le mérite d’avoir abouti à la création de la Commission des Nations Unies pour le Développement Durable en charge de l’implémentation des résolutions prises.

2.      LES RESOLUTIONS


A l’issue du sommet de Rio, plusieurs résolutions sont prises et confinées dans 5 textes : il s’agit de La déclaration de Rio ou Charte de la terre, de La convention sur le changement climatique, de La convention sur la biodiversité, de La déclaration sur la forêt et de l’Agenda 21 ou Action 21.
-          La charte de la terre: elle proclame 27 articles portant sur l’environnement, l’économie, le social et la paix (voir Rao Pako susmentionné, pp. 11-13). Cette charte régit les conduites des nations et des peuples vis-à-vis des domaines susmentionnés de manière à ce que la terre reste à la fois viable tant pour les générations présentes et êtres vivants que pour les générations futures[15]; elle s’attèle donc à réduire l’action de l’homme sur l’environnement en stipulant que la protection de l’environnement fait partie intégrante du processus de développement et ne peut être considéré isolement[16]. De plus, le principe 25 affirme l’interdépendance entre la paix, le développement et la protection de l’environnement non sans compter le rôle vital de la femme dans la gestion de celle-ci (Principe 20). Tout Etat a le droit de se développer et ce, en exploitant les ressources naturelles tout en tenant bien sur compte de l’environnement (principe 3). Pour cela il devrait limiter ses consommations qui pourraient porter atteinte au développement durable d’où les principes comme celui de précaution ou celui du pollueur-payeur qui non sans faire disparaitre la pollution la diminue toute de même dans le sens que, seuls ceux qui disposent de moyens financiers  s’en réserve le droit. 

-          La convention sur le changement climatique: elle porte essentiellement sur l’effet de serre du fait qu’elle appelle les nations à diminuer leur émission à effet de serre sachant qu’elles ne peuvent inverser le processus de réchauffement climatique. Toutefois, toute référence à un délai précis n’a pas été précisée car les Etats Unis avaient refusé d’inclure une telle clause leur obligeant à réduire leur émission de gaz à effet de serre d’ici 2000. Signée par 153 Etats et prévoit des aides financières pour les pays du Sud, leur permettant ainsi de prendre les mesures nécessaire et un mécanisme de suivi.

-          La convention sur la biodiversité : entrée en vigueur en 1993, elle vise la protection de la biodiversité et sa gestion à l’échelle mondiale, sa conservation et son utilisation raisonnable. Par ailleurs, les bénéfices découlant de l’exploitation des espèces vivantes devront être partagés équitablement. C’est ainsi que  153 pays signèrent cette convention à l’exception des Etats Unis. Cette convention est la suite de plusieurs processus engagés bien avant le sommet à l’instar de la convention baleinière internationale signée en 1946, du traité de l’Antarctique prévoyant des mesures de protection de la faune et de la flore et bien d’autres.

-          Déclaration sur la forêt : pour parvenir à cette déclaration, les pays du Nord comme du Sud ont eu des difficultés sur le choix du type de foret à protéger ; elle concerne 17 principes de  force non obligatoire. Liée aux questions d’environnement de même que de développement, elle vise le développement durable basé sur l’instauration d’une politique d’exploitation  raisonnable des forets. De même, elle a aussi pour mission de rendre le monde plus vert. Pour la réalisation de ces objectifs, elle comprend aussi plusieurs articles encourageant une aide financière aux pays en développement.

-          Agenda 21: il est constitué de 800 pages et 40 chapitres définissant ses objectifs et ses priorités. Il est encore appelé plan d’action pour le 21ème siècle et a été adopté du fait de sa vision à long terme et du fait qu’il pourrait permettre l’amélioration de la planète en plus de la vie de ses habitants. Les gouvernements sont alors d’accord que le développement durable est possible mais qu’aucun pays ne peut le réaliser tout seul. Cet agenda permet de déterminer les responsabilités de tout un chacun dans la mise sur pied du principe de développement durable  et à les inculquer le sens de l’engagement ; raison pour laquelle les Etats sont invités à se doter d’une stratégie de développement durable tandis que les collectivités locales sont invitées à mettre au point des Agenda 21 locaux. Cet Agenda est à l’origine de la création de la « commission pour le développement durable.» A l’exception de la déclaration sur la forêt, ces multiples résolutions  n’ont pas de force obligatoire.
Pour la réalisation de ses différents objectifs, la conférence de Rio prévoyait  plusieurs sources de financement  des pays du Sud tels que les APD et le fond mondial pour l’environnement. Ce dernier est géré par la banque mondiale, le PNUD et le PNUE. Les  APD quant à elles, peuvent prendre plusieurs formes : celle des prêts concessionnels (prêts consentis à des taux inférieurs à ceux du marché), des dons représentants les capitaux octroyés non remboursables et, l’assistance technique qui est l’aide en nature. Cette aide a été consacrée par les nations développées  de 0.7%  de leur produit national brut.

B.   LES PILIERS DU DEVELOPPEMENT DURABLE : DE RIO A COPENHAGUE


            Le concept de développement soutenable repose sur trois axes majeurs que l’on nomme souvent «piliers du développement durable». Une analyse de ces piliers en rapport à l’implémentation des résolutions prises au cours des différents sommets ayant succédés à Rio est ici nécessaire.

1.      ENVIRONNEMENT OU ECOLOGIE


                Après le sommet de Rio, la protection de l’environnement devient un impératif pour toutes les nations du monde, car il y a eu constat que non seulement l’environnement se dégrade très vite, mais aussi on assiste au réchauffement climatique dû à la destruction de la couche d’ozone par des émissions de gaz à effet de serre. Pour pallier à ce problème, les nations du monde et surtout celles développées s’étant engagées à réduire leurs émissions de gaz se rencontrent d’abord en 1995 à Berlin autour du changement climatique. Puis 2 ans plutard, ils signent au Japon le « Protocole de Kyoto» qui vise la concrétisation de l’objectif principal de la Charte de la terre à savoir «stabiliser la concentration des gaz à effet de serre dans l’atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique[17] dangereuse du système climatique ». Par ailleurs, la Convention précise qu’« il conviendra d’atteindre ce niveau dans un délai suffisant pour que les écosystèmes puissent s’adapter naturellement aux changements climatiques, que la production alimentaire ne soit pas menacée et que le développement économique puisse se poursuivre d’une manière durable[18] ».
              L’objectif comme l’avais déjà prôné le rapport Brandt en 1977 est donc de diminuer les rejets polluants l’atmosphère, lutter contre le déboisement, la désertification et la sécheresse, protéger la biodiversité, les forêts et les montagnes, promouvoir une agriculture respectueuse de l’environnement et de la santé, protéger les océans et les ressources halieutiques, promouvoir les énergies renouvelables[19], etc. Les spécialistes s’accordent en effet à dire que, compte tenu de l’inertie des systèmes climatiques, la réduction des gaz à effet de serre doit intervenir le plus rapidement possible. Le protocole de Kyoto prévoit la réduction des émissions des gaz à effet de serre à l’horizon 2012 selon les quotas suivants : l’Union européenne  8 % ; les États-Unis de 7 %; le Japon et le Canada de 6 % ; tandis que la Russie doit les maintenir stables. Enfin, le protocole prévoit aussi qu'afin d’honorer leurs engagements, les pays industrialisés puissent acheter des droits d’émission aux pays pauvres. Ces permis d’émission, surnommés « permis de polluer », ne devraient cependant concerner qu’une faible partie des réductions. Toutefois, le protocole de Kyoto soulève dès son adoption de nombreux problèmes. En effet, les États-Unis trouvant leur quota de réduction trop contraignant pour leur économie, montrent leur réticence. Ils réclament l’abandon du principe d’une limite au marché des permis d’émission, mais également la prise en compte des forêts, censées agir comme des « puits de carbone[20] » emprisonnant le CO2. Enfin, ils s’opposent à toute sanction financière en cas de non-respect des engagements de Kyoto. Les Européens rejettent la position américaine, considérant que les pays industrialisés doivent montrer l’exemple et objectant que les États-Unis, qui ne représentent que 5 % de la population mondiale, produisent à eux seuls plus de 25 % du total des émissions de CO2. Malgré tout, les Etats Unis finissent par se retirer en 2001 du protocole de même que l’Australie et la Corée du Sud.
                  Le 16 juillet 2001 s’ouvre à Bonn la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques, avec pour enjeu de trouver enfin un accord sur la mise en œuvre du Protocole de Kyoto ; après plusieurs négociations, les délégués de 180 pays, excepté les États-Unis, parviennent, le 23 juillet, à trouver un terrain d’entente. Le principal événement de la conférence de Bonn est le ralliement de la Russie, du Japon et du Canada à l’Union européenne et au Groupe des 77 (ou G77, qui réunit 133 pays en développement) sur un texte qui comporte cependant de nombreux compromis (notamment la déduction dans le comptage des émissions du gaz carbonique absorbé par les forêts en phase de croissance). Par ailleurs, les pays développés annoncent la création d’un fonds pour aider les pays en développement à faire face aux changements climatiques et à gérer leurs émissions de gaz à effet de serre. Aussi, elle ouvre la voix au processus de ratification dudit Protocole qui trouve son aboutissement en 2005.
           Deux ans après l’entrée en vigueur du protocole de Kyoto, s’ouvre la 62e session des Nations Unies  à New York du 25 septembre  au 03 octobre autour  de deux points essentiels à savoir les questions relatives au maintien de la paix dans le monde et celles relatives à l’environnement, plus particulièrement les changements climatiques[21]. Un mois plutard, se tint à Bali en Indonésie la conférence des nations unies sur le changement climatique. Les enjeux de cette conférence sont une continuité de ce qui a été décidé depuis les conférences et sommets précédents. Il s’agit entre autre de l’établissement d’une feuille de route pour les négociations relatives à l’après 2012 marquant le début de la deuxième phase du protocole de Kyoto, la désignation d’une entité chargée de gouverner et d’administrer les fonds pour l’adaptation du protocole de Kyoto. L’un des enjeux de Bali consistait donc à donner une suite au dialogue portant sur la participation des pays en développement et des Etats-Unis au futur régime climatique international post-2012. L’ensemble des pays présents s’est mis d’accord sur une voie de négociations qui devra conduire, pour fin 2009 au plus tard, à un nouvel accord international de lutte contre le changement climatique. Les pays en développement ont choisi d’être très clairs sur les conditions de leur future participation à la lutte contre le changement climatique. Une réduction des émissions de gaz à effet de serre des pays industrialisés de 25 à 40% pour 2020 par rapport à 1990, un transfert de technologies adéquat des ressources financières à la hauteur et prévisibles pour permettre aux pays en développement d’atténuer leurs émissions de gaz à effet de serre, de s’adapter aux impacts du changement climatique, de réduire la déforestation, de diversifier leurs économies etc. c’est dans  cette même lancée que s’inscrira le sommet de Copenhague tenu en 2009 portant toujours sur les changements climatiques.
Le sommet de Copenhague s’ouvre sur  des tensions et des suspicions de manipulations. En effet, il y est question de réfléchir sur l’après Kyoto et les accords de Copenhague reposent entre autre sur la limitation de la hausse des températures à 2 degré d’ici 2050, réduire les émissions des gaz à effet de serre  en fonction des choix faits par chacun des pays industrialisés dans un engagement écrit et à fournir avant la fin Janvier 2010, l’aide à l’adaptation des PVD aux impacts du changement climatique en deux volets. Le premier concerne les trois années jusqu'à 2012, pour lesquelles l’UE, le Japon et les Etats-Unis se sont engagés globalement pour 3,6 milliards de $. Pour la suite il est envisagé d’ici 2020 d’apporter une aide de 100 milliards par an. Aussi, nous avons l’absence de contraintes légales pour les engagements pris et de vérification par une organisation mondiale, dont la création n’est pas à l’ordre du jour. Les pays devront ainsi faire une déclaration aux Nations Unies concernant leur situation tous les deux ans et enfin la reconnaissance de l’importance de la réduction des émissions dues à la déforestation; des mesures incitatives sont prévues pour financer la protection des forêts par des fonds venant des pays développés.
Cependant, le fossé qui s’est agrandi entre les pays développés et le reste du monde  pendant les négociations suscite des inquiétudes pour l’avenir. Car l’on espérait le renforcement d’une solidarité active fondée sur l'interdépendance à Copenhague, mais on a assisté à un recul et à un repli venant essentiellement des pays développés. L’entrée de la Chine et des États-Unis dans la négociation a été réellement le fait majeur de ce sommet. L’arrivée des deux premières puissances mondiales dans le processus a bouleversé les équilibres antérieurs. Elles sont ensemble responsables de plus de la moitié des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. Elles ont  affirmé l’une comme l’autre la nécessité de lutter contre le changement climatique et leur engagement à le faire, mais en définissant leurs propres cadres. Les États-Unis ne voulaient pas, pour des raisons de politique intérieure, s'engager sur des réductions importantes des gaz à effet de serre. Pour les Chinois,  toute possibilité de vérification  par une organisation étrangère était exclue, considérée comme une atteinte à leur souveraineté. Les États-Unis et la Chine ont très nettement fait reculer ce que le Protocole de Kyoto mettait déjà en application. Face à ces deux superpuissances, l’Union européenne n’a pas su défendre une position réellement unifiée, claire et forte, et le reste du monde  a exprimé sa colère et sa déception en ce qui concerne l’indifférence des grandes puissances face aux effets du réchauffement climatique.
Ce sommet, du fait même de son échec, marque un tournant majeur dans un processus entamé il y a plus de quinze ans. Tout le monde semble maintenant s'accorder sur des initiatives à prendre pour limiter le réchauffement climatique, mais le défi de leur mise en œuvre reste entier. De fait, les changements à venir concernent l'organisation de la vie quotidienne de chacun, les façons d’habiter, de manger, de circuler, de travailler.

2. SOCIAL ET ECONOMIE

Conformément aux engagements pris à Stockholm de se retrouver tous les 10 ans pour réfléchir sur les questions environnementales, le 2e sommet de la terre qualifié de Sommet Mondial sur le Développement Durable et du commerce équitable (SMDD) ou encore Rio +10 s’est tenu à Johannesburg en 2002 avec pour principal objectif de redonner vigueur à l’engagement mondial en faveur du développement durable[22]. Le  but est d’établir un bilan du travail accompli, et de trouver des solutions pour poursuivre la réalisation des divers accords et déclarations du 1er Sommet de la Terre. Le plan de 67 pages contient une déclaration sans contraintes en faveur de quelques objectifs spécifiques de l’Agenda 21.       
Le sommet de Johannesburg  quant à lui s’ouvre dans un climat général de pessimisme de la part des organisations écologiques nationales comme internationales et des organisations humanitaires à cause de la dégradation de l’environnement mondial et des ressources naturelles. Citons notamment le rapport des Nations unies The Global Environnent Outlook, qui, entre autres prévisions alarmistes, estime qu’en 2032, plus de la moitié de la planète sera confrontée à des problèmes de pénurie en eau, et que 70 % de la nature aura été détruite. Si aucune action concrète n’a vraiment été réalisée depuis Rio, malgré les espoirs que ce Sommet a pu susciter, l’application de l’Action 21 frôle le fiasco avec une revue à la baisse de plusieurs de ses objectifs (l’engagement des nations du Nord à verser 0,7 % de leur PNB au pays du Sud est passé à 0,39 %). En outre, les désaccords  entre  le Sud et  le Nord restent les mêmes qu’en 1992. On note également une opposition entre l’Union européenne et les États-Unis, ces derniers refusant la notion d’objectifs contraignants (notamment dans le domaine du développement des énergies renouvelables).
         Malgré un succès mitigé de ce sommet par rapport à celui de 1992, le concept de développement soutenable va prendre en compte, à partir de Johannesburg, non seulement l’écologie, mais aussi les aspects économiques et sociaux[23]. Le sommet de Johannesburg a donc été une opportunité majeure pour la communauté internationale d’avancer vers un avenir viable permettant la satisfaction des besoins sans destruction de l’environnement. Il cherchait aussi à combler les failles du plan adopté  à Rio à travers la mise sur pied d’un  plan d’action concret.
           Pour ce qui concerne l’aspect social qui y a été renforcé dans la poursuite du développement durable, il s’agit de prendre en compte le fait que la conservation de la nature a pour finalité la satisfaction des besoins humains c’est-à-dire garantir l’accès à la santé et à l’éducation, lutter contre la pauvreté et la faim, améliorer les conditions de vie, lutter contre l’exploitation des enfants, renforcer les groupes sociaux à travers les syndicats, les associations et les ONG et intégrer les populations dans le processus de développement. La stratégie mondiale donnait ainsi raison à l’approche de l’UNESCO à partir du concept de  réserve de biosphère, qui considère que les humains font partie de l’écosystème, qu’il s’agit de conserver. A Johannesburg  il s’agit donc pour les stratégies de développement de prendre en compte la sphère sociale et économique, étant donné que les humains sont la seule destination des progrès économiques et environnementaux. L’ambition est de créer une société universelle de bien-être assurant à l’ensemble de ses habitants l’accès effectif à l’ensemble des droits humains, politiques, civiques et civils ; économiques à commencer par le droit au travail décent, sociaux et culturels; enfin les droits dits collectifs c’est-à-dire le droit au développement, à l’environnement, à la ville, à l’enfance. Du coup, l’écologie devient une vaste histoire naturelle entrelacée avec l’histoire humaine pour produire une coévolution de notre espèce avec la planète[24] pour la comprendre et infléchir dans le bon sens afin d’éviter la dérive dangereuse qui fait peser des interrogations sur l’avenir même de la vie dans la biosphère, nous n’avons plus le droit de nous comporter comme si de rien était et continuer à détruire l’environnement.

             Dans le volet économique, il est question de mettre en place une coopération internationale avec les PED, de lutter contre la pauvreté, de modifier les modes de production et de consommation, de favoriser le commerce équitable entre le Nord et le Sud, d’intégrer les paramètres du développement durable dans les processus de décisions fonder sur une dimension sociale basée sur l’emploi et la solidarité, une efficacité économique qui permette aux paysans de vivre avec des volumes de production relativement modestes, seul moyen pour garder des actifs nombreux et enfin, le respect des consommateurs et de la nature censés produire en fin de compte une harmonie universelle. En d’autres mots, la transition vers le développement durable suppose une modification du profil de la demande avant de s’attaquer aux modalités de la production de l’ordre, c’est-à-dire au choix des techniques et des localisations[25]. En effet, l’enjeu principal est celui de l’autolimitation des besoins matériels de la part des nantis.
Les grandes dynamiques environnementales, comme le changement climatique, la biodiversité, la désertification, ont des impacts sur le devenir des économies et des sociétés. Moins évidente pour de nombreuses personnes et pour nombre de gouvernements est‚ la globalité du désastre de la pauvreté et de ses conséquences actuelles et potentielles; ainsi que celle des interactions entre pauvreté, ressources renouvelables et environnement. Il n’y a pas, d’un côté, un environnement changeant avec une tendance lourde à la dégradation et, d’un autre cote, des humains, des gouvernements, des sociétés et des économies: dynamiques sociales et dynamiques naturelles évoluent en interaction.  Ainsi donc, trois principes s’offrent à nous. Le premier est le scenario de la catastrophe qui, selon les lieux, pourra venir tantôt d’une rupture sociale, tantôt d’un désastre écologique, les deux se conditionnant mutuellement. Le second, consiste en réalité en une recherche de techniques plus respectueuses de l’environnement, pouvant donner lieu à une croissance plus propre mais pas nécessairement plus créatrice d’emplois et, à la limite, une croissance en harmonie avec la nature mais très cher payée en termes de ses retombées sociales. Ainsi, nous aboutirons au développement durable.  
RIO+20 se tiendra du 20 au 22 Juin 2012 à Rio. Les objectifs de cette prochaine conférence des nations unies sont de garantir un engagement politique renouvelé au développement durable et dresser un bilan des discussions  internationales sur l’environnement. Elle mettra aussi l’accent sur deux thèmes spécifiques: une économie verte dans le contexte de l’éradication de la pauvreté et un cadre institutionnel pour le développement durable. Des puissances comme la France prônent pour cet effet la création de l’Organisation Mondiale de l’Environnement(OME). Toutefois, au vue du jeu d’intérêt dans  la politique internationale et les réticences répétées des deux plus grands pollueurs de la planète, on en est à se demander si l’on y sera capable d’un réalisme écologique.


Deux décennies après la naissance du développement soutenable, une analyse mérite d’être faite afin  de dégager les bons et les mauvais points car comme toutes les autres stratégies de développement, elle a certainement ses limites et apports.

A.   APPORTS AU CAMEROUN

 

Bien qu’au plus haut sommet de l’Etat, la vision du Cameroun en terme de développement soutenable ne peut pas être clairement identifiée, dans les discours politiques, le concept de développement durable est de plus en plus évoque. Dans cette lancé, le pays lui a non seulement consacré tout un département ministériel (ministère de l’environnement, de la protection de la nature et du développement durable) depuis décembre 2011, mais aussi il a intégré de nombreux projets sous régionaux et internationaux dans l’optique de contribuer de façon significative à la reduction et l’exploitation abusive des forets et des eaux tels que la commission du bassin du Congo et celle du Lac Tchad.
Les activités économiques et la lutte continuelle pour la croissance ont poussé à des prélèvements parfois trop abusifs sur la faune, la flore et ont conduit à une dégradation de l’environnement qui est aujourd’hui fragilisé du fait des déchets et de la pollution des éléments de cet environnement (eau, air, couvert végétal, sols, etc.). Ainsi, pour atténuer cette dégradation, le pays s’est réapproprié l’opération « Sahel vert » lancé depuis les décennies 70, l’action des parlementaires avec le concept un député – un arbre qui a conduit les parlementaire à deux reprise à faire des tournées nationales pour lutter contre la désertification est également à mettre dans cet actif. Notons également que des efforts sont fait pour assainir les villes à travers une meilleure gestion des déchets, la création des espaces verts et plus récemment encore la ville de Douala a adopté sur Agenda 21 local tel que prévu par les résolutions de Rio et dans lequel elle planifie comment elle entend contribuer au développement durable dans les années avenirs. Ce qui est une avancée significative. Il est également important de souligner les multiples campagnes de sensibilisation organisées par les associations et ONG de promotion de développement soutenable sur la nécessité de préserver la planète.  Notons aussi que chaque année, le FEICOM prime les villes les plus propres du Cameroun dans l’optique d’encourager leurs dirigeants à améliorer la qualité de la vie dans ces milieux.
Il est certain que des efforts restent à faire dans ce domaine, mais ce que nous retenons c’est qu’il est important de faire quelque chose. C’est-à-dire d’être soi-même le vecteur du changement.

B.   CRITIQUES DU DEVELOPPEMENT DURABLE


La route qui mène à la satisfaction des besoins présents sans compromettre ceux des générations futures est encore loin d’être réalisée. Pour y parvenir, de nombreuses réformes et mesures méritent d’être prises aussi bien au niveau national qu’à l’échelle internationale et ceci de façon courageuse afin de rendre ce type de développement véritablement durable.
Au niveau international par exemple, il serait important de passer des engagements aux actes. En effet, les résolutions de Rio et même de Johannesburg n’étant en rien contraignantes (hors mis la convention sur les changements climatiques), de nombreux pays ne les accomplissent jamais. L’APD est passée, pour les pays membres du Comité d’aide au développement (CAD) de l’OCDE, de 0,33 % du PNB en 1992 à 0,24 % du PNB en 1999 et seuls 4 pays  (Danemark, Pays-Bas, Norvège et Suède) sont parvenus à atteindre les 0,7% fixés en 1992. L’absence de mécanisme de contrôle de réduction des émissions de gaz à effets de serre (Art. 3 du protocole de Kyoto) et la possibilité donnée à chaque pays de déclarer lui-même ses réductions biaisent le jeu des rapports entre les pays du Sud poumons de la planète et ceux du Nord et de l’Orient principaux pollueurs. Il serait peut-être temps de penser à la création d’une Organisation Mondiale du Développement Durable (OM2D) avec une forte implication des pays du Sud  et non tout simplement une Organisation Mondiale de l’Environnement (OME) que prône la France car une telle organisation ne ferait que chercher des solutions aux problèmes d’un groupe.
De plus le consensus qui prévaut autour du développement durable semble nier l’existence des intérêts toujours contradictoires entre les dominants et les dominés. La priorité donnée dans le discours des institutions financières internationales, à la lutte contre la pauvreté ne doit pas masquer leur part de responsabilité dans les politiques engendrant paupérisation et croissance des inégalités. Un développement répondant aux besoins présents d’une humanité solidaire, mais qui laissent aux générations futures la possibilité de survivre et de prospérer ne peut se satisfaire de la mise en œuvre de filets sociaux économiquement efficace et écologiquement soutenable, il doit aussi être socialement équitable, émancipateur pour les femmes et les hommes. Démocratiquement fondé, géopolitiquement accepté et culturellement diversifié.
La solidarité internationale sur les enjeux du développement soutenable peut compromettre l’avenir de nombreux pays en développement qui résulte désormais des négociations internationales. En effet, les accords de la Convention climat par exemple encadrent les politiques énergétiques et de transport. Les accords sur la biodiversité et sur la désertification façonnent certains aspects des politiques forestières et agricoles. On peut alors se demander si, d’une manière plus générale, ces formes de régulation globale par négociation ne font pas l’impasse sur les instruments nationaux ou régionaux. Pour un pays en développement ou un ensemble régional par exemple, parler de développement durable, serait définir des programmes qui permettraient à un certain horizon, l’absorption de la fin de la croissance démographique en termes de satisfaction des besoins alimentaires, d’habitat, de transports, de santé, et d’emploi. C’est serait aussi constituer à cet horizon une économie et un espace de production durable et compatible avec l’évolution internationale. C’est également vouloir préserver un environnement viable afin d’aboutir à une société où les tensions sociales sont en voie d’apaisement.
Enfin, comme Michel Griffon et Jean-Charles Hourcade, nous pensons que nous ne devons pas nous contenter d’une définition du développement durable qui donnerait la priorité au traitement des grandes questions environnementales et économiques internationales, s’appuyant uniquement sur des régulations internationales établies par des négociations abandonnées aux seuls rapports de force entre grands pays[26]. Accepter une telle tendance signifierait que nous n’avons pas d’autre choix de développement que celui d’un ajustement interne aux contraintes externes.

Au terme de ce travail où il a été question d’épiloguer sur le concept de développement soutenable, nous pouvons au regard de ce qui précède affirmer que les organisations internationales et la société civile ont joué un rôle majeur dans l’émergence de ce paradigme et qu’il est depuis 92, au cœur de toutes les négociations internationales entre le Sud et le Nord. Malgré les réticences liées à la mise en œuvre des différents accords internationaux, le développement soutenable peut en définitive être entendu comme la mise en pratique d’un certain nombre de principes contribuant à l’amélioration du bien-être, à d’avantage de justice sociale (inter et intra générationnelle), au respect des écosystèmes. Il s’agit de penser et d’agir autrement, de faire reposer la modification des modes de consommation et de production sur une nouvelle éthique. Le développement durable désigne donc une direction à prendre. C’est une dynamique, un processus d’évolution bien plus qu’un but en soi ou une série d’objectifs précis à atteindre. C’est une notion évolutive, fonction de la progression des connaissances sur l’environnement et des effets d’apprentissage. Il est donc important pour l’Afrique entant qu’acteur non négligeable de ce long processus de saisir l’opportunité pour faire valoir ses positions car « l’examen des rapports de puissance à l’échelle internationale montre aujourd’hui que l’Afrique dispose bien plus que par le passé, d’excellentes cartes à jouer dans un contexte d’affaiblissement relatif de l’Occident et de la montée en puissance de la Chine et des pays émergents[27] ».  

Barbault, Antoine : « Sommet du développement durable : quels enjeux, quelles contributions des scientifiques », 2002,  document  PDF
Déclaration de Rio, 1992
Hulse, Joseph: Sustainable development at risk, june 2007
Michel Griffon et Jean-Charles Hourcade : « Le développement durable à l’épreuve des rapports Nord-Sud », Ceras - revue Projet n°270, Juin 2002. URL: http://www.ceras-projet.com/index.php?id=1804.
Njomgang, Claude : Economie des ressources naturelles et de l’environnement, L’harmattan, 2009
Norgaard, Richard: Development Betrayed: The End of Progress and a Coevolutionary Revisioning of the Future, New York and London: Routledge, 1994
ONU : Rapport du CNUE, New York, 1972.
ONU: the Global Environnent Outlook, 2002.
Pako, Rao: (2000). Sustainable development
Pondi, Jean Emmanuel : Repenser le développement à partir de l’Afrique, Yaoundé, afredit 2011
Protocole de Kyoto (1997): Art. 2; 3; 5
Tagou, Célestin : « Les théories et politiques globales du développement: de Truman aux OMD » in Pondi, Jean Emmanuel : Repenser le développement à partir de l’Afrique, Yaoundé, afredit, 2011

World Commission on Environment and Development (WCED), Our Common Future (New York: Oxford University Press, 1987)


[1] Truman cité par Célestin TAGOU, « Les théories et politiques globales du développement: de Truman aux OMD » in Pondi, Jean Emmanuel : Repenser le développement à partir de l’Afrique, Yaoundé, afredit 2011, p. 28
[2] Il s’agit notamment d’Adam Smith avec le LIBERALISME, d’Emile Durkheim et la DIVISION DU TRAVAIL, de Karl Marx et la DIVISION DES CLASSES comme moteur de l’histoire, de Max Webber qui prône l’association du CAPITALISME à l’éthique protestante et enfin de John Menard Keynes avec L’INTERVENTIONNISME.
[3] TAGOU, Celestin: Op.cit. p. 37
[4] Op.cit. p. 42
[5] Célestin Tagou soutient à propos que toutes les définitions qui nous sont fournies ne disent pas ce qu’est  le développement, mais donnent plutôt ses objectifs.
[6] Norgaard, Richard B: Development Betrayed: The End of Progress and a Coevolutionary Revisioning of the Future, New York and London: Routledge, 1994,   p. 22.    .
[7] World Commission on Environment and Development (WCED),  Our Common Future  (New York: Oxford University Press, 1987), p. 8
[8] Op.cit. p. 46
[9] Pako, Rao: Sustainable development, 2000,  P. 3
[10] ONU. Rapport du CNUE, New York, 1972.
[11] Brandt, Willy (1913-1992) : homme politique allemand,
[12] Brundtland, Gro Harlem (1939- ) : médecin et femme politique norvégienne.

[13] Hulse, Joseph: sustainable development at risk, june 2007
[14] Pako, Rao: Op.cit. p.10
[15] Hulse, Joseph : Op.cit.
[16] Déclaration de Rio, Principe 4
[17] Qui résulte de l’action humaine
[18] Protocole de Kyoto. Art. 3 (7) et 5
[19] Op.cit. Art. 2
[20] Réservoir de carbone qui pendant une période donnée de temps absorbe globalement plus CO2 qu’il n’en rejette
[21] Tagou, Célestin : Op.cit. p. 44
[22]  Tagou, Célestin : Op.cit.  
[23] Njomgang, Claude : Economie des ressources naturelles et de l’environnement, L’harmattan, 2009, pp. 17-22
[24] Barbault, Antoine : Et al.  « Sommet du développement durable : quels enjeux, quelles contributions des scientifiques », 2002, p. 40 document  PDF
[25] Op.cit.
[26] Michel Griffon et Jean-Charles Hourcade, « Le développement durable à l’épreuve des rapports Nord-Sud », Ceras - revue Projet n°270, Juin 2002. URL : http://www.ceras-projet.com/index.php?id=1804.
[27] Pondi, Jean Emmanuel : Repenser le développement à partir de l’Afrique, Yaoundé, Afredit, p. 572

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